16.
ENVIRONNEMENT
COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Manquement d’État - Directive
95/21/C.E. du Conseil - Navires faosant escale dans les ports de la Communauté
ou dans les eaux relevant de la juridiction des États membres - Sécurité
maritime - Prévention de la pollution - Conditions de vie et de travail à
bord des navires.
En n’adoptant pas, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires
et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 95/21/C.E.
du Conseil, du 19 juin 1995, concernant l’application aux navires faisant
escale dans les ports de la Communauté ou dans les eaux relevant de la
juridiction des États membres des normes internationales relatives à la sécurité
maritime, à la prévention de la pollution et aux conditions de vie et de
travail à bord des navires (contrôle par l’État du port), la République
italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de la dite
directive.
Cour de Justice des Communautés Européennes
(5° ch.), 11 novembre 1999, non encore publié au recueil, aff. C-315/98, procédure
en manquement: Commission des Communautés
Européennes c. République italienne - M. D. A. EDWARD, prés.; M. F. G. JACOBS,
av. gén.
NOTE - NON-CONFORMITÉ DE
LA LÉGISLATION ITALIENNE AUX NORMES INTERNATIONALES
RELATIVES À LA SÉCURITÉ MARITIME, À LA PREVENTION DE LA POLLUTION ET
AUX CONDITIONS DE VIE ET DE TRAVAIL À BORD DES NAVIRES
Le
présent arrêt de la Cour revêt une importance particulière, eu égard
notamment à la récente catastrophe de pollution marine survenue dans les eaux
territoriales et sur les côtes françaises. Il pose à nouveau la question de
la sécurité et de la fiabilité des navires transportant des substances
polluantes et des carences de la réglementation actuelle tant internationale
que communautaire.
Dans
sa décision, la Cour considère que République italienne n’a pas adopté les
dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour
se conformer à la directive 95/21/C.E. du Conseil, du 19 juin 1995, concernant
l’application aux navires faisant escale dans les ports de la Communauté ou
dans les eaux relevant de la juridiction des États membres des normes
internationales relatives à la sécurité maritime, à la prevention de la
pollution et aux conditions de vie et de travail à bord des navires (contrôle
par l’État du port; J.O. L 157, p.1[1].
Suite à une mise en demeure de la Commission, en 1997, le gouvernement italien
avait indiqué que la directive avait bien été insérée dans le projet de loi
communautaire 1995-1996 n.128, contenant une liste des directives non encore
transposées. En constatant l’absence de transposition, la Commission a
introduit le présent recours. La République italienne soutenait qu’une série
de circulaires étaient suffisantes pour assurer la mise en oeuvre de la
directive en question. La Cour a estimé que, selon une jurisprudence constante,
de simples pratiques administratives, par nature modifiables au gré de l’administration
et dépourvues de publicité adéquate, ne peuvent être considérées comme
constituant une exécution valable des obligations du traité (cf.: C.J.C.E., 16
déc. 1997, aff. C-316/96, Commission c. Italie, Rec. 1997, p.I-7231, point 16).
Cet
arrêt témoigne un intérêt croissant de la Communauté européenne pour la sécurité
maritime et la protection des eaux contre la pollution imputable aux navires
transportant des substances dangereuses ou polluantes.
On
peut rappeler ici que la Communauté, en suivant les orientations et les textes
adoptés au niveau international (cf. la convention pour la prévention de la
pollution par les navires, Marpol, de 1973 et la convention pour la sauvegarde
de la vie humaine en mer, Solas, 1974), avait déjà adopté une importante
directive - 93/75/C.E.E. du Conseil - pour la protection de son espace maritime,
concernant les conditions minimales imposées aux navires à destination des
ports de la Communauté ou trasportant des marchandises dangereuses ou
polluantes (J.O. L 247, pp.19-27).
La
directive 95/21/C.E. constitue, donc, une étape importante dans l’évolution
du droit communautaire dans le domaine en la matière. Elle témoigne la volonté
de la Communauté de suppléer à l’absence d’application par les États du
pavillon des normes internationales relatives à la sécurité. La conformité
à telles normes et à celles relatives à la prévention de la pollution et aux
conditions de vie et de travail à bord doit également être assuré par l’
“État du port” (6° considérant de la directive 95/21). La Communauté a
créé un ensemble de règles, de critères et de procédures uniformes
applicables aux inspections par l’ “État du port”, en conformité avec
les conventions internationales. Cet ensemble de règles concerne, entre autres,
l’organe national de contrôle et les obligations en matière d’inspection (articles
5 et 6), la procédure d’inspection (article 6) et les cas de suppression des
anomalies et immobilisation du navire (article 9).
Il
est vrai qu’une réglementation internationale en ce domaine existe déjà.
Dans la lutte contre la pollution survenue en mer par les hydrocarbures, on a
assisté a plusieurs étapes au niveau international.
Avant
l’entrée en vigueur de la Convention de 1969 sur la responsabilité civile
pour les dommages causés par les hydrocarbures, les textes existants n’étaient
pas réellement dissuasifs, eu égard à l’insuffisance du niveau des
indemnisations prévues. Depuis l’entrée en vigueur de la Convention de 1969,
une réparation plus importante des dommages peut être obtenue. Toutefois les
États-Unis n’ont pas ratifié cette Convention (les sociétés responsables
de la catastrophe de 1978 du pétrolier libérien Amoco Cadiz y étaient
domiciliés). Ils ont adopté une loi interne, le “1970 Oil Pollution Act”,
en prévoyant des sanctions élevées, mais en bouleversant le droit maritime
international traditionnel.
La
Communauté estime que les textes internationaux n’assurent pas une protection
suffisante contre la pollution par hydrocarbures. Les “États de pavillon” vérifient
insuffisamment la conformité de leurs propres navires aux normes
internationales et dès lors une intervention efficace des “États du port”
s’avère nécessaire. Que dire, en outre, des “sanctions” pour
non-conformité aux Conventions ? Comment assurer le respect effectif de telles
dispositions et le contrôle de conformité à celles-ci ? La Communauté essaie
de développer ses normes “internes” visant à protéger son milieu marin,
en conformité avec les orientations et les dispositions adoptées à niveau
international.
Dans
l’optique communautaire “l’État du port” semble le plus apte à vérifier
le contrôle de conformité aux normes internationales sur la sécurité
maritime. Trois projets sont à l’étude: l’interdiction progressive des pétroliers
à coque unique d’ici à 2015, le contrôle renforcé des navires dans les
ports de l’Union Européenne et la surveillance accrue des sociétés de
classification chargées de décider si les navires transportant des produits
dangereux sont aptes à naviguer.
[1] Cette directive a été, ensuite, modifiée par la directive 98/25/C.E. du Conseil du 27 avril 1998, J.O. L 133, p.19), selon l’article 20 paragraphe 1 de la directive 95/21/C.E.